Ce jour-là, nous avions prévu une journée en famille :
Moi ta maman, ton papa, ton frère ainsi que ma sœur, son mari et tes cousins.
Tu ne voulais pas nous accompagner. Tu étais fatiguée, tellement fatiguée. Cela faisait des nuits que tu ne dormais pas convenablement ou pas du tout. Et pour combler le tout, ce fichu mal de ventre qui s’ajoute à l’insomnie.
Ca ne servait à rien de te réveiller, disais-tu !
La journée s’est passée, un seul sms échangé…
Nous sommes rentrés à la maison vers 18H50… Tu étais là… Ton corps était là, mais plus notre fille.
Tu nous avait quitté pour toujours.
J’ai hurlé. hurlé, je ne savais plus faire que hurler de douleur.
Margaux, tu avais 14 ans…
A 12 ans, Margaux était une jeune fille souriante, pétillante et pleine de ressources.
Elle pratiquait le Hip-Hop depuis quelques mois et adorait ça. Ça lui ressemblait tellement.
Elle était bosseuse à l’école, elle avait des projets et avait commencé les secondaires en immersion néerlandais. Elle en voulait, elle savait qu’elle y arriverait. Elle aimait la vie, elle aimait ses potes plus que tout aussi...et surtout, elle était amoureuse !
Depuis toute petite
Margaux est hypersensible pour certains, incontrôlable pour d’autres.
Elle cache sa sensibilité derrière un caractère bien affirmé. Mais
malgré son caractère, certaines personnes avaient bien cerné son
innocence, sa naïveté et son bon cœur. On te prend, on te jette. Un
jour, tu es la meilleure amie de tout le monde et le lendemain, tout le
monde te déteste. Tu ne comprends pas et pourtant tu continues de donner
100 % de ton cœur et tu continues aussi à croire en l’amour. Cet amour
même qui te prend et te jette…
Trop jeune pour comprendre que nous agissons pour ton bien, tu t’entêtes et tu fais ton chemin. Tu veux te battre toute seule. Mais ton mal-être t’envahit. Et le monde continue de s’acharner. Même les adultes autour de toi te demandent de prendre du recul et de gérer tes émotions.
A 12 ans, à 13 ans… Tu retournes contre toi ta colère et les scarifications commencent. Les émotions, elles sont envahissantes, difficiles à comprendre et elles débordent de toi… Personne ne te comprend.
Fugues
à répétition, prise de médicaments...les spécialistes maintiennent que
tu as la force en toi pour t'en sortir. Mais personne ne voit la vraie
Margaux, Margaux blessée, Margaux trahie... Tu t'es peut-être sentie
abandonnée même de nous, tes parents ! Tu t'éteins, nous le voyons bien
et la lutte persiste... Le monde extérieur ne veut pas ton bien. L'amour
avec un grand A n'est pas celui auquel tu t'attendais, mais tu
continues sur ta lancée car tu en es convaincue, les gens peuvent
changer !
Mais les gens ne changent pas et tu souffres. Tu encaisses tant physiquement que moralement.
Et ce jour là, tu décides que cela doit cesser !
Extrait de sa lettre :
« Maman fallait que j’te dise, ces
derniers temps je vivais sans trop l’être… je regrette toutes les choses
que je t’ai dites… tu me haïras après que je me serai tuée mais j’ai
plus la force de rester. Je suis devenue ce que je détestais auparavant…
Il est préférable que tu ne saches rien, à quoi sa sert que vous
sachiez que sur mes routes je me perds ?... Alors je préfère tout
quitter… J’ai longtemps dû attendre avant d’en finir mais la souffrance
en moi a su me donner ce courage… J’ai essayé d’être heureuse je te jure
mais rien n’y fait, j’ai plus la force de supporter cette boule dans
mon ventre qui grossit de jour en jour, supporter ces larmes qui coulent
sans cesse, … Je suis arrivée au stade où vivre devient impossible… »